Pascal-Adolphe-Jean Dagnan-Bouveret
(Paris 1852 - 1929 Vesoul)

La ronde

Pastel, 535 x 361 mm,
signé (en bas à gauche) "Pascal. Dagnan-B"

Découvert dans une vente publique parisienne en mai 2008. Acquis par un collectionneur privé italien la même année. Revendu, pour son compte, en 2010, à un collectionneur privé français.

 

Notice de l'oeuvre :

Jean Adolphe-Pascal Dagnan naît à Paris le 7 janvier 1852. Il est élevé par son grand-père Gabriel Bouveret, dont il ajoute le nom au sien, par reconnaissance. Elève de Cabanel et de Gérôme, second Prix de Rome en 1876, il fait son entrée au Salon en 1875 avec un sujet mythologique et deux dessins, qui dénotent l’importance accordée à cette étape dans l’élaboration de ses tableaux. Il consacre ses débuts aux scènes de genre d’un réalisme descriptif et narquois qui lui valent un premier grand succès : Une noce chez le photographe (fig.1).



Sous l’influence de Jules Bastien-Lepage, il s’oriente vers le mouvement naturaliste, dont il devient l’un des chefs de file. Il quitte Paris pour s’établir en Franche-Comté où il se consacre à des sujets tirés de la vie quotidienne rurale. Le succès remporté par Chevaux à l’abreuvoir (1884, huile sur toile, 225 x 175 cm, Chambéry, musée des Beaux-Arts) au Salon de 1885, coïncidant avec la mort prématurée de Bastien-Lepage, le désigne comme son principal successeur. Il se rend en Bretagne, comme Gauguin et Emile Bernard à la même époque, attiré par les paysages et par la foi profonde et archaïque qui anime ses habitants. Il expose son premier sujet breton au Salon de 1887, Le Pardon en Bretagne (fig. 2), suivi par les Bretonnes au Pardon (1887, huile sur toile, 125,3 x 141,3 cm, Lisbonne, Fondation Calouste Gulbenkian).



Le naturalisme de Dagnan-Bouveret n’est pas le fruit d’une peinture composée sur le vif. Dans sa volonté de réalisme, l’artiste recourt à la photographie pour mieux fixer sur la toile ces scènes de la vie paysanne. Il organise, dans son atelier, un espace où ses modèles viennent poser individuellement et se faire photographier. Les dessins pris d’après le modèle vivant et les études photographiques sont ensuite incorporés dans la composition finale. Ce naturalisme recomposé par le truchement du dessin et de la photographie, qui lui valut de nombreuses critiques1 dans la presse contemporaine, confère à ses tableaux un lyrisme étrange et fascinant.

reconnaissance officielle et de la faveur d’un public international, il choisit pourtant d’explorer une nouvelle voie, en présentant deux oeuvres, Dans la prairie (1892, huile sur toile, 96 x 91 cm, collection privée) et Dans la forêt (1892, huile sur toile, 154 x 122 cm, Nancy, musée des Beaux-Arts), où la description réaliste cède le pas à un sentiment plus élevé, qui trouve un écho immédiat auprès de la jeune génération symboliste.


C’est à cette période d’expérimentation picturale qu’appartient notre pastel qui doit être rapproché d’une composition de grand format, La Ronde (fig. 3), commande privée restée inachevée, représentant trois jeunes paysannes dansant dans la forêt. Cette scène pastorale moderne célébrant l’union de l’homme et de la nature fut élaborée à partir d’une série de photographies et de dessins préparatoires. Notre pastel, qui appartient à cette série, constitue un éminent témoignage de la méthode de travail « additive » de Dagnan-Bouveret. Le groupe de trois danseuses, dont le mouvement suspendu évoque un effet photographique, est repris, dans une attitude légèrement différente, comme motif principal du tableau final exécuté au pastel et à l’huile. Le paysage dans lequel s’insèrent les trois femmes s’inspire quant à lui d’une photographie (fig. 4) que l’artiste avait déjà utilisée pour composer Dans la forêt2, l’un des tableaux du Salon de 1893.



Par son sujet, qui annonce les oeuvres d’Henri Matisse, et par sa technique non descriptive, notre pastel révèle la volonté de Dagnan-Bouveret d’explorer de nouvelles voies en s’ouvrant de plus en plus aux idées symbolistes. Comme l’explique fort bien le Professeur Weisberg, « Plus Dagnan-Bouveret accroît la précision de ses représentations, plus il ressent le besoin d’aller au-delà de la pure transcription du réel, pour trouver l’essence des scènes qu’il peint. L’instinct naturaliste de Dagnan-Bouveret le conduit directement à une conversion mystique »3. Cet engagement spirituel du peintre, qui s’exprime d’abord dans les sujets religieux des années 1880 (Le pain béni, 1884, huile sur toile, 124 x 84 cm, Paris, Musée d’Orsay) et 1890 (La Cène, huile sur toile, 300 x 495 cm, Arras, musée des Beaux-Arts) s’intensifie et s’étend aux sujets profanes, comme notre Ronde, auxquels il confère une grande force d’évocation. Tout en consolidant sa réputation internationale d’artiste académique Dagnan-Bouveret renouvèle donc son art par son ouverture au symbolisme et son engagement mystique. Il consacre la fin de sa carrière aux portraits officiels pour lesquels il reçoit de nombreuses récompenses et autres marques d'honneur: officier de la Légion d'Honneur en 1891, il entre à l'Institut de France en 1900.

Comme l’exprime très bien le Professeur Weisberg, l’ouverture de Dagnan-Bouveret aux idées symbolistes accroît encore l’impact produit par ses tableaux : en engageant l’attention du spectateur par des moyens abstraits plutôt que par des détails narratifs, il introduit une dimension lyrique et quasi-mystique dans ses toiles. témoignent de l’ouverture de Dagnan-Bouveret aux nouvelles expérimentations alors même qu’il connaît une gloire internationale pour Elle fut exécutée dans une technique mixte jamais employée par l’artiste. et réalisée dans une technique inédite cheCette oeuvre réalisée au pastel et à l’huile sur toile était une commande privée, restée inachevée.
Ce pastel révèle également la volonté de l’artiste de joindre à son réalisme une plus grande part d’émotion/lyrisme. Cette spiritualité s’exprime plus directement encore dans ses compositions religieuses, comme et, surtout, La Cène, 1896.
Artiste célébré de son vivant, il est le portraitiste du Tout-Paris et expose ses oeuvres au Salon National dès sa fondation en 1890. n’empêcha pas qu’on lui remît la médaille d’honneur du Salon et le grand prix de l’Exposition universelle pour son Pardon en Bretagne.

Célébré de son vivant pour ses tableaux de genre réalistes et ses portraits mondains recherché, Dagnan-Bouveret a longtemps souffert du mépris dont furent victimes les peintres réalistes de la IIIème République. Les récentes acquisitions de ses oeuvres par les musées nationaux témoignent d’un regain d’intérêt pour cet artiste dont notre pastel révèle toute la richesse et la singularité du talent.

Jean Adolphe-Pascal Dagnan naît à Paris le 7 janvier 1852. Il est élevé par son grand-père Gabriel Bouveret, dont il ajouta le nom au sien par reconnaissance. Passionné par le dessin et la peinture, il entre à l'école des Beaux-Arts, où il fréquenta les ateliers de Cabanel et de Jean-Léon Gérôme. Il fit la connaissance de Jules Bastien-Lepage et de Gustave Courtois, qui deviennent ses amis. sous l’influence duquel il devint l’un des principaux représentants du mouvement naturaliste. Durant la seconde moitié du XIXème siècle, Dagnan-Bouveret jouit d’une notoriété internationale. Peintre naturaliste qui reçut de nombreuses commandes. Son oeuvre lui valut nombre de distinctions et autres marques d'honneur : officier de la Légion d'Honneur en 1891, il entre à l'Institut de France en 1900, alors qu'il fait partie de plusieurs académies.
Elève de Léon Gérôme et Alexandre Cabanel, Dagnan-Bouveret participe à son premier Salon en 1875. Dans les premières années de sa carrière, il s’exerce à une peinture de genre non dénuée d’humour. Sous l’influence de Julien Bastien-Lepage, il devient un des chefs du mouvement naturaliste qui alors s’internationalise. Après la mort de son maître, il s’oriente vers une peinture aux intonations plus poétiques et mystiques, voire symbolistes, notamment dans la représentation de scènes bretonnes, telles que Le Pardon en 1886. Plutôt que de se contenter de la sincérité d’une vision directe, il la dépasse et tente d’y ajouter une part de sentiment élevé. Pourtant, c’est en tant que portraitiste qu’il est adulé par l’aristocratie parisienne. Maintes fois distingué lors des salons, il est promu officier de la Légion d’honneur en 1900.

_________________________________
1 - Pr. G.P. Weisberg, “P.A.J. Dagnan-­?Bouveret and the Illussion of Photographic Realism”, Arts Magazine, mars 1982, pp.100-­105).
2 - Pr. G.P. Weisberg, Against the Modern, Dagnan-°©?Bouveret and the Transformation of the Academic Tradition, 2002, New York, Dahesh Museum of Art, p.102
3 - Pr. G.P. Weisberg, « P.A.J. Dagnan-­?Bouveret, Jules Bastien-­?Lepage, and the Naturalist Instinct », Arts Magazine, Avril 1982, pp. 70-­?76.


 


Hubert Duchemin
8, rue de Louvois - 75002 - PARIS
Tél: +33 (0)1 42 60 83 01
Email: hubert@hubertduchemin.com
copyright hubert duchemin 2013