Jean Rivière
(1853-1924)

Paysage au clair de lune

Huile sur toile,
24,5 x 33 cm

Vendu

 

Notice de l'oeuvre :

Jean Rivière était fils d’artisans ébénistes. Il se forma à l’école des Beaux-Arts de Toulouse, à partir de 1869, et rencontra à cette occasion Henri Martin, Henri Marre et Paul Pujol. Il acquit une certaine notoriété grâce à la sculpture. En 1889, il participa à l’exposition organisée en mars 1889, dans l’atelier d’Henri Gérard à Toulouse. Il devint également professeur d’art décoratif et industriel à l’Ecole des beaux-arts de Toulouse et occupa la chaire de sculpture ornementale.
Parmi le petit nombre d’œuvres parvenues jusqu’à nous, on compte essentiellement des sculptures : un autoportrait (ill. 1) et un vase en terre-cuite (ill. 2), mais aussi quelques peintures (ill. 5).

 
Notre artiste partagea toutes les joies et les peines d’Henri Martin. Jean Rivière manifesta, tout au long de sa carrière, un profond dévouement pour son ami, qu’il admirait sincèrement, comme en témoigne un extrait de correspondance entre les deux artistes : « (Henri Martin :) ...Pourquoi ne pas me parler de toi ; tu me racontes ce que je pense. Mon ami, crois-tu que cela suffit à ma curiosité amicale ; crois-tu que je n’aurais pas plaisir à savoir ce que tu deviens. Malgré tes intentions vis-à-vis de moi je ne puis passer sous silence ta façon d’agir : aussi je te prie pour l’avenir de ne pas tant te sacrifier1 ».
Jean Rivière réalisa pour Henri Martin des cadres en bois précieux, tandis que ce dernier appuya la candidature de son ami lorsqu’il postula pour la commande d’une sculpture pour la salle des illustres du Capitole de Toulouse. Jean Rivière se rendit fréquemment à Collioure, chez les Martin, en compagnie de sa femme Pauline, brodeuse, et sa fille Hélène, future peintre et professeure de dessin.
Henri Martin, en témoignage de son amitié sincère, réalisa un portrait de notre artiste (ill. 3). Dans l’apparition de Clémence Isaure aux Troubadours, Henri Martin donna à l'homme barbu, situé au premier plan, les traits de son ami Jean Rivière (ill. 4). Ce dernier devait initialement figurer parmi les personnalités représentatives de l’éloquence, de la philosophie et de l’art de peindre de la région dans Les Quais de la Garonne, commandé par la municipalité toulousaine, mais Henri Martin fut contraint de l’effacer, « bien que cela le désole », car la silhouette arrêtée de Jean Rivière ralentissait le rythme des promeneurs.

 
Dans notre œuvre, Jean Rivière rend hommage à Henri Martin en adoptant sa touche allongée et divisée, visible essentiellement dans la partie inférieure. L’enchevêtrement de touches aboutit, en bas à gauche, à des empâtements caractéristiques. Dans le Champ moissonné, rare tableau de l’artiste qui nous soit parvenu, on retrouve également une touche divisée pour la représentation du blé coupé, qui s’oppose au large ciel gris brossé de façon uniforme. L’artiste livre ici une composition très lumineuse, d’une rare sobriété, qui tend presque vers l’abstraction (ill. 5).

 

 
Notre œuvre révèle l'intérêt de l'artiste pour l'esthétique symboliste : retranscrit ici une vision nocturne paisible et sereine et privilégie la mélancolie d’un clair de lune. Un chemin à droite, qui se profile dans l’obscurité, semble mener tout droit vers un singulier clocher, dont la silhouette se détache sur l’horizon. Le ciel, sujet principal du tableau, occupe les deux-tiers de l’espace. Le découpage des nuages renvoie aux formes synthétiques des ciels de Charles Guilloux (ill. 6).
 

Ce paysage, poétique et mystérieux, constitue un rare témoignage de l’art de Jean Rivière peintre. Il permet de redécouvrir un artiste oublié mais talentueux, ouvert aux préoccupations artistiques de son époque.
Amélie du Closel

 

1 Lettre d’Henri Martin à Jean Rivière, 1884.


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